Mobilité sociale

Mobilité sociale et famille

A partir de l’itinéraire de travail des individus et en s’appuyant sur les travaux traitant de la mobilité professionnelle, on peut déterminer, à chaque étape du cycle de vie, si les enquêtés sont en phase d’ascension, de déclassement ou de stagnation sociale. L’examen des effets de tels cursus sur le mariage et la fécondité s’avère ainsi fort instructif. Les analyses conduites à partir des données de l’enquête de Bamako ont montré que la mobilité professionnelle descendante accélère la sortie du célibat des femmes (allant à l’encontre d’une tendance générale au retard de l’âge au premier mariage des femmes) et, au contraire, retarde le mariage des hommes, renforçant la tendance générale observée chez ces derniers (Marcoux et Piché, 1998). Par ailleurs, la mobilité ascendante accélère la sortie du célibat des hommes. Dans un contexte de crise, l’effet combiné de ces tendances vient donc favoriser davantage l’augmentation de l’écart d’âge au premier mariage entre conjoints, écart qui à son tour a un effet non négligeable sur le maintien de la polygamie observé au Mali (Marcoux, 1997).

La même démarche peut également être suivie pour l’étude de la fécondité, comme l’ont fait Richard Marcoux et Victor Piché (2001) pour Bamako, de même que Ngoy Kishimba (2003) avec les données de Yaoundé. Les données de ces enquêtes se prêtent en effet très bien par exemple pour l’examen de l’hypothèse d’une transition démographique de crise qui annoncerait un déclin de la fécondité. Chez les hommes on observe que l’effet des différents cursus professionnels n’est pas direct sur l’agrandissement ou non de la taille de leur descendance ; il passe plutôt par les variables intermédiaires démographiques bien connues : le recul du mariage, la stabilité de l’union, la mortalité infantile, etc. Pour les femmes, on observe que la mobilité professionnelle ascendante conduirait même à accélérer l’arrivée des naissances de rang 1 et 2, ce qui permet aux auteurs de dire que « l’incompatibilité des rôles de mère et de travailleuse semble donc devoir être tout à fait exclue » (Marcoux et Piché, 2001).

A Yaoundé, Ngoy Kishimba (2003) observe de faibles probabilités d’ascension sociale et au contraire relève des chances réduites de rester dans les catégories aisées pour les jeunes générations issues de ces catégories découlant de la crise de l’emploi. À l’inverse de l’hypothèse d’une transition de crise qui conduirait à la limitation des naissances, Ngoy Kishimba (2003) observe à Yaoundé que la mobilité sociale descendante accélère l’entrée en union et favorise une précocité de la fécondité, en particulier hors mariage.